
Le Mal des ardents d’Alice Brygo
Le Fresnoy, passionnant territoire d’expérimentations narratives et formelles, nous présente ici une interprétation cauchemardesque de l’incendie de Notre-Dame. Dans un premier temps, les ralentis compensés par les algorithmes retranscrivent aussi bien l’horreur du public que la sensation d’assister à quelque chose d’irréel. Le film laisse ensuite place à un monde entièrement virtuel où les voix-off des personnages retranscrivent leurs pensées. Certains sont sous le choc, d’autres sont indifférents : chaque avatar est isolé dans ses pensées. Portrait d’une France fracturée (à supposer qu’elle ait déjà été unie), Alice Brygo signe un court-métrage formidable et un témoignage puissant.
For Mouna de Spencer Bogaert
On aura rarement vu le ping-pong sous ce jour. Digne d’un shōnen, l’introduction montre un pongiste concentré dans une salle presque vide. La balle devient alors une sorte de portail par lequel on voyage à travers les formes et les époques, du super 8 au numérique. L’ensemble est un peu cryptique et manque de lisibilité, mais l’audace de vouloir iconiser le ping-pong séduit.
Heart of an Astronaut de Jennifer Rainsford
Il y a deux films en un dans Heart of an Astronaut. Le premier est un portrait de Brigitte Godard, doctoresse des astronautes, qui raconte la relation spéciale qui l’unit à ses patients. Le sujet est passionnant : peut-on vivre ses rêves par procuration ? Comment appréhender un voyage si lointain ? Malheureusement, rien de tout ça n’est creusé tant le second film prend de la place : un documentaire scientifique ronflant sur le métier d’astronaute.

(…) de Karina Beumer
Pour retranscrire la perte de mémoire de son père, Karina Beumer opte pour un jeu de pistes à base de montage survolté et de métaphores visuelles. Le film mélange sculptures en carton-pâte et effets visuels réalisés en post-production. Le résultat est créatif et ludique, sans jamais diminuer les enjeux : le dernier plan, dans lequel le père est littéralement bloqué dans sa tête, est d’une puissance évocatrice glaçante.
L’Arrestation de C. d’Arthur Jaquier
Le film d’Arthur Jaquier possède un protagoniste passionnant. “C” a une véritable présence, aussi bien dans son physique (son regard est dur mais tendre, il a une blessure à vif sur le visage) que dans ses interactions avec ses amis. La structure du court-métrage est malheureusement un peu flottante, comme s’il s’arrêtait une fois le personnage trouvé : plusieurs pistes sont amorcées mais aucune n’est développée.
Squid Fleet de Will N. Miller et Ed Ou
Spot écologiste en faveur des pêcheurs chinois, Squid Fleet est truffé d’images magnifiques de pêche aux calamars. Le film est traversé par la voix off d’un homme qui raconte le métier aliénant de son père. Malheureusement, le court-métrage est dans un entre-deux qui peine à convaincre : trop publicitaire pour toucher en profondeur, trop narré pour être un tract politique fort.
Dentures de Nikhil Lama et Siddharth Potade
Un vieil homme amnésique fête ses 90 bougies dans un hôtel. Pendant la célébration, il part à la recherche de son dentier et se perd dans l’immense lieu. Faux documentaire et vraie comédie, cette déambulation spatio-temporelle est d’un humour noir mordant. Le regard distancié des cinéastes fait mouche ; Roy Andersson n’est pas loin.

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